Les pavillons des années 70 se montrent plus que vétustes pour un établissement de soins. La direction espère reconstruire, mais les finances font encore défaut. Le personnel est à bout de souffle.
Dans certains pavillons, les carrelages brunâtres ont perdu leur vernis et certains angles. Les douches ont pris la rouille, tout comme les plaques en fer qui servent de faux plafond. Certaines ont rendu l’âme depuis très longtemps laissant apparaître les fils électriques. On peut se demander comment une commission de sécurité n’a pas mis son véto sur la poursuite des activités. La visite du centre hospitalier de Jury ne manque pas de surprises. Désagréables. Si le site, très arboré, bâti dans un écrin de verdure de quelques soixante ares, peut séduire, les bâtiments se montrent désuets, inadaptés à un centre de soins. « Nous sommes au XXIe siècle, et l’année dernière encore nous avions des seaux dans les chambres d’isolement », confie Brigitte Dulac, cadre de santé.
« Comment respecter la dignité des patients ? »
Dans l’unité de soins sans consentement, pour passer d’un couloir à l’autre, il faut passer par les toilettes. On ne vous décrira pas la couleur vert-glauque des murs qui a perdu toutes ses vertus apaisantes. on s’arrêtera dans la salle de visites, meublée de quelques sièges et d’une vague table basse rebricolée. Rien de feutré. Rien de confidentiel dans cet espace réservé aux familles.« J’ai 22 patients, comment respecter la qualité des visites ? », s’interroge la cadre de santé . Elle n’attend plus de réponses.
Autre pavillon, autre ambiance, autre odeur. De celle qui vous saisit, jusqu’à la nausée. « Odeur de reflux, d’égouts, constatent Olivier Astier et Maurice Zilliox, respectivement directeurs de l’établissement et des soins. « Comment faire pour respecter la dignité des patients ? »
Dans la salle à manger située à l’étage, les dalles du plafond jaunies rappellent le temps des fumeurs. « L’hôpital a été construit sur le modèle des villages de vacances. Dix-huit pavillons de soins et 56 maisonnettes abritant cafétériat, self, ateliers… », explique Maurice Zilliox. Ici, aucune chambre seule, uniquement des chambrées de deux voire trois lits alignés dans un espace ne répondant plus aux normes, sous des armoires-ponts qui empêchent d’installer des matériaux médicalisés. « Modèle village de vacances », insiste-t-on. Qui désespèrent les équipes de soins à bout de souffle.
Au centre hospitalier spécialisé de Jury rien ne va plus. Les dés sont pipés par un désengament financier de l’Etat qui se pérennise. Certains investissements ont été réalisés au compte-gouttes dans certains secteurs. « Notre pavillon a été réhabilité. 0n a constaté l’apaisement des patients »,reconnaît Auriane Haury, cadre de santé. Ils espèrent une reconstruction, savent qu’ils devront encore prendre leur mal en patience. Mais la souffrance est là.
Reconstruire, oui, avec quel financement ?
Photo Maury GOLINI
En 2014, Olivier Astier est arrivé à Jury pour remplir une mission : « Proposer une recomposition de la psychiatrie en Moselle-Nord qui comprend Jury, Lorquin et Thionville. »
À Jury, les dernières décisions statuent pour la construction d’un bâtiment neuf pour une capacité d’accueil de 180 lits et un coût de quelque 55M€. Parallèlement, l’hôpital de Mercy devrait accueillir une unité d’accueil et d’orientation urgences, connectés sur les urgences du CHR de Metz-Thionville ainsi qu’un centre d’accueil de crise.
Enfin, sur le site de Mercy toujours, il est prévu de construire un bâtiment qui regrouperait : l’unité d’hospitalisation des adolescents, le centre médical des addictions, le centre de psychogériatrie et l’ensemble des activités actuellement en place à la clinique Tivoli. Le coût prévisionnel de l’ensemble de ces opérations est estimé à 90M€. C’est là que le bât blesse, puisqu’il manque 70M€.
À Jury, « l’organisation des unités est prête, la programmation technique détaillée est réalisée » assure Véronique Defloraine, directrice des services techniques. Tout le monde est dans l’attente. « Il y a une volonté politique d’investir, reprend le directeur. Quand ? Tout le monde l’ignore. Ce qu’ils savent, c’est qu’il y a urgence.
"Quand les patients viennent à l’hôpital, ils sont en crise. Il faut donc des locaux adaptés, du personnel en nombre et suffisamment formé." Maurice Zilliox : Directeur des soins
PHOTOS. Le Centre hospitalier de Jury désespère d’être reconstruit
Photo Maury GOLINI
Photo Maury GOLINI
Photo Maury GOLINI
Photo Maury GOLINI
Photo Maury GOLINI
Photo Maury GOLINI
Photo Maury GOLINI
Photo Maury GOLINI
Photo Maury GOLINI
Photo Maury GOLINI
Photo Maury GOLINI
Photo Maury GOLINI